Éclairage et musée
Pour un musée, lieu publique de plaisir, de savoir, d'interrogation, l'éclairage est un élément important tout autant comme facteur d'interprétation, que du confort et du bien être des visiteurs, sans oublier son action de dégradation sur un grand nombre de matériaux. Ces différents aspects sont repris dans les articles qui suivent.
L'éclairage d'exposition
Marcel Storr - Carré de Baudouin, Paris 2011
Cet autre média de la (re)présentation, l'éclairage,
a depuis longtemps acquis au théâtre une place dans l'élaboration de la mise en
scène à travers ses effets, ses accentuations et sa dynamique, il n'en est pas
de même, et de loin, dans le monde de
l'exposition.
De la non prise en compte au bon moment de l'éclairage comme élément intrinsèque de la muséographie, résultent de graves déconvenues sur la compréhension du contenu, le confort visuel et la satisfaction des visiteurs ainsi que sur la conservation des collections.
Tout ceci nous amène à définir l'éclairage d'exposition comme la mise en œuvre de la lumière, d'une manière expressive, avec la volonté de communiquer tout en conservant au mieux l'intégrité matérielle des objets présentés.
Il faut donc considérer le traitement de la lumière en muséographie comme :
- un moyen d'expression
- un élément d'ergonomie
- mais aussi, un facteur de dégradation.
De la non prise en compte au bon moment de l'éclairage comme élément intrinsèque de la muséographie, résultent de graves déconvenues sur la compréhension du contenu, le confort visuel et la satisfaction des visiteurs ainsi que sur la conservation des collections.
Tout ceci nous amène à définir l'éclairage d'exposition comme la mise en œuvre de la lumière, d'une manière expressive, avec la volonté de communiquer tout en conservant au mieux l'intégrité matérielle des objets présentés.
Il faut donc considérer le traitement de la lumière en muséographie comme :
- un moyen d'expression
- un élément d'ergonomie
- mais aussi, un facteur de dégradation.
L'éclairage comme moyen d'expression
L'éclairage, comme élément de la muséographie, peut être
assimilé à un langage, qui, tels les autres éléments, remplit les critères d'un
système sémiotique.
On peut donc prendre en compte un ensemble de variables lumineuses (la chroma, l'intensité lumineuse, la direction, etc.) qui, combinées entre-elles, formeront les unités significatives de ce langage ou plutôt de ce co-langage.
• la température de couleur (blanc chaud ou froid);
• l’intensité (l’éclairement ou la luminance);
• la chroma (teinte et saturation);
• la forme (nette ou floue de la tache);
• la texture (douce ou dure);
• la direction (l’ombre);
• la dimension (surface de la tache);
• l’implantation (l’emplacement de la tache);
• le contraste (entre l'objet et son fond);
• le mouvement (variations d’intensité, de couleur, de direction, etc.).
On peut donc prendre en compte un ensemble de variables lumineuses (la chroma, l'intensité lumineuse, la direction, etc.) qui, combinées entre-elles, formeront les unités significatives de ce langage ou plutôt de ce co-langage.
• la température de couleur (blanc chaud ou froid);
• l’intensité (l’éclairement ou la luminance);
• la chroma (teinte et saturation);
• la forme (nette ou floue de la tache);
• la texture (douce ou dure);
• la direction (l’ombre);
• la dimension (surface de la tache);
• l’implantation (l’emplacement de la tache);
• le contraste (entre l'objet et son fond);
• le mouvement (variations d’intensité, de couleur, de direction, etc.).
L'éclairage général
Salle centrale - Musée Guimet, Paris
C'est l'éclairage général qui crée l'ambiance de l'exposition.
Le plus généralement diffus, réalisé à l'aide d'une verrière
en éclairage naturel, ou par réflexion de la lumière avec
des sources artificielles.
C'est un éclairage de volume qui enveloppe contenu et contenants
dans une même atmosphère.
Le plus généralement diffus, réalisé à l'aide d'une verrière
en éclairage naturel, ou par réflexion de la lumière avec
des sources artificielles.
C'est un éclairage de volume qui enveloppe contenu et contenants
dans une même atmosphère.
L'éclairage localisé dirigé
Simon Hantaî - MNAM Paris 2013
c’est un éclairage qui inclut l’objet dans la surface environnante.
.
.
L'éclairage localisé focalisé
Keiyh Haring - MAM Paris 2013
C’est un éclairage qui met l’accent sur un point
particulier sans couper l’objet de son voisinage.
particulier sans couper l’objet de son voisinage.
L'éclairage localisé cadré
Marcel Storr - Carré de Baudouin Paris 2011
C’est un éclairage qui sépare l’objet de son environnement,
il le décontextualise.
il le décontextualise.
L'éclairage spécifique
Ceci est un exemple d'éclairage spécifique comme la simulation de l'effet de la lumière du jour sur une oeuvre de Simon Hantaï, La tabula lilas, par le mélange de la lumière blanche de tubes fluorescents à 5000 K avec celle de tubes de type lumière noire (ultraviolet). Les deux ensembles de sources gérer par un programme sous le protocole DALI pour stimuler les azurants optiques contenues dans la toile.
Articles et communications personnels dans ce domaine.
- L'éclairage comme élément de la muséographie (2010)
Clotilde Boust, Jean-Jacques Ezrati, 2nd CIE Expert Symposium on Appearance - When appearance meets lighting, GENT, Belgium, 8-10 Sept. 2010,
Abstract: Light designers in Museum and exhibition galleries can nowadays choose between several artificial lights. It is possible to choose different color temperatures and illuminations. The choice of the best color temperature of artificial light in museum have been studied, but they usually test only direct sources without taking into account the ambiance light. The meaning of work of art showed is not take into account either. We conducted an experiment with photographies, lightened with accent lighting at different color temperatures, changing the ambiance light color temperature and illumination. We asked observers about their interpretation and appraisal of images.
- L'éclairage muséographique ( la lettre de l'OCIM n° 95, 2004)
ezrati-ocim-lumiere-ti.pdf | |
File Size: | 1280 kb |
File Type: |
- Museum lighting (Professional Lighting Design n° 16, 1997)
pld_eng16.pdf | |
File Size: | 2892 kb |
File Type: |
- L'usage de la lumière naturelle en muséographie (1996)
icom_cc_11th_1996.pdf | |
File Size: | 4158 kb |
File Type: |
- L'éclairage des vitrines (Muséofiches, 1996)
lclairage_des_vitrines.pdf | |
File Size: | 1003 kb |
File Type: |
- Approche pragmatique de la conservation préventive (2011)
1508_79_ezrati_icom-cc_2011.pdf | |
File Size: | 1133 kb |
File Type: |
- L'exposition des œuvres fragiles à la lumière (2007)
ezrati-suptrace-ti.pdf | |
File Size: | 880 kb |
File Type: |
- Influence of color temperature of general lighting compared to accent lighting on works of art's perception.
influence_de_la_temprature_de_couleur_fd_allemand.ppt | |
File Size: | 833 kb |
File Type: | ppt |
Publications
Théorie, technique et technologie de l'éclairage muséographique
Cet ouvrage s'adresse à ceux qui veulent se former à ce domaine, étudiants ou jeunes professionnels, ainsi qu'à tous ceux qui côtoient l'exposition : conservateurs, architectes, restaurateurs, régisseurs, etc.. En fonction son expérience personnelle, certains chapitres sembleront succincts au lecteur, mais ils sont là, à leur place, pour appréhender la pluralité des savoirs et des compétences que requiert cette activité.
Le premier chapitre situera l'éclairage muséographique dans l'histoire mais aussi dans le contexte du musée, de l'exposition et de l'usage de la lumière du jour.
Plus technique, voire technologique sera le deuxième chapitre consacré à la lumière comme matériau, à sa mesure et à sa production.
Avec le troisième, on étudiera l'interaction de la lumière avec la matière, de là, sa maîtrise pour en arriver à son utilisation raisonnée.
Le quatrième chapitre, enfin, traitera de l'éclairage d'exposition comme élément intrinsèque à toute scénographie : c'est ici que se mêlent les aspects physiques et physiologiques, le côté objectif de l'éclairement, avec l'aspect sémantique et sensible beaucoup plus subjectif, la lumination.
Puis, en marge de l'éclairage, un dernier chapitre sur la mesure de la couleur et ses applications en muséographie.
Le premier chapitre situera l'éclairage muséographique dans l'histoire mais aussi dans le contexte du musée, de l'exposition et de l'usage de la lumière du jour.
Plus technique, voire technologique sera le deuxième chapitre consacré à la lumière comme matériau, à sa mesure et à sa production.
Avec le troisième, on étudiera l'interaction de la lumière avec la matière, de là, sa maîtrise pour en arriver à son utilisation raisonnée.
Le quatrième chapitre, enfin, traitera de l'éclairage d'exposition comme élément intrinsèque à toute scénographie : c'est ici que se mêlent les aspects physiques et physiologiques, le côté objectif de l'éclairement, avec l'aspect sémantique et sensible beaucoup plus subjectif, la lumination.
Puis, en marge de l'éclairage, un dernier chapitre sur la mesure de la couleur et ses applications en muséographie.
L'exposition, théorie et pratique
Comme l'ouvrage précédent, celui-ci est destiné aux étudiants et aux jeunes professionnels. En fait il reprend le contenu de nos cours, notamment ceux donnés dans le cadre de l'école du Louvre, de l'institut national du patrimoine - INP, de l'office de coopération et d'information muséographique - OCIM et un centre national de la formation du personnel territorial - CNFPT.
La première partie, plus muséologique, traite de l'exposition sous sa forme théorique, tandis que la seconde, plus muséographique, traite de la mise espace en analysant les différents éléments à travers d'expositions passées.
Un glossaire terminologique et une bibliographie termine l'ouvrage.
Ci-dessous la version espagnol diffusée en Amérique Latine.
La première partie, plus muséologique, traite de l'exposition sous sa forme théorique, tandis que la seconde, plus muséographique, traite de la mise espace en analysant les différents éléments à travers d'expositions passées.
Un glossaire terminologique et une bibliographie termine l'ouvrage.
Ci-dessous la version espagnol diffusée en Amérique Latine.
Eclairage d'exposition, musées et autres espaces
compte rendu de lecture par Noèmie Drouget, muséologue
Noémie Drouguet
Eclairage d'exposition. Musées et autres espaces, Paris, Eyrolles, 2014,(167 p.)
Mots-clés :conservation, exposition, musée, éclairage, sémiotique, théâtre,visiteur
Successivement régisseur lumière au Centre Pompidou, éclairagiste conseil à la Direction des Musées de France, puis membre du C2RMF, Jean-Jacques Ezrati, aujourd'hui consultant et formateur en éclairage, est bien connu du monde muséal. Ses précédents ouvrages consacrés à l'éclairage muséographique1 sont des références appréciées des étudiants et des professionnels des musées. Le nouveau manuel qu'il vient de publier trouvera lui aussi une place de choix dans la bibliothèque de tous ceux qui s'intéressent à l'éclairage d'exposition : les muséographes et les conservateurs, les scénographes et les architectes, les éclairagistes et les concepteurs lumière.
L'ouvrage s'ouvre avec le rapprochement entre l'éclairage d'exposition et l'éclairage scénique, dans le monde du théâtre essentiellement. Soulignant autant les différences que les similitudes entre ces deux domaines, l'auteur met en évidence une caractéristique essentielle de l'éclairage muséographique : on ne peut pas le réduire à un acte technique car il constitue l'un des supports du message de l'exposition. Comme l'éclairage scénique participe de l'interprétation d'une pièce (qu'elle soit musicale ou théâtrale) en plongeant le spectateur dans des ambiances particulières, l'éclairage d'exposition revêt une dimension conceptuelle en guidant la perception et l'appréhension d'un ou plusieurs messages par le visiteur. Certes, les quelques pages dédiées à une histoire des lieux, théâtre ou musée, ne donnent qu'un aperçu simple et quelque peu rebattu de l'évolution des institutions mais elles permettent d'esquisser cette comparaison féconde, qui accompagnera le lecteur dans la suite de l'ouvrage.
Jean-Jacques Ezrati marque d'emblée son intérêt pour le public : tout comme on comprend qu'il apprécie la proximité, voire une certaine porosité entre la salle et la scène au théâtre, il s'intéresse autant sinon plus aux visiteurs des expositions qu'aux objets à éclairer. Ou, pour le dire autrement, il se plaît à rappeler à ses lecteurs qu'une exposition n'a de sens que dans la mesure où elle transmet un contenu (objets et discours) à des publics variés. Constamment, il se soucie de celles et ceux qui sont amenés à parcourir une exposition et à regarder les collections exposées. C'est la raison pour laquelle Ezrati reprend à son compte une citation de Clarence S. Stein dans son rapport de la Conférence de Madrid sur l'architecture et l'aménagement des musées, organisée par l'Office international des Musées (OIM), l'ancêtre de l'ICOM, en 1934 : "Dans l'étude de l'éclairage, on partira du principe que les musées d'art sont destinés aux êtres humains plutôt qu'aux objets inertes, qu'ils ont surtout leur raison d'être comme lieux de récréation et de compréhension et non comme magasins de dépôt" (p. 47). L'éclairage a donc un rôle à jouer dans le rapport qui se tisse entre l'exposition et le visiteur, entre l'objet et celui qui le regarde. Il contribue à la mise en espace et à la mise en relation ; donc à la scénographie.
En bon pédagogue, Jean-Jacques Ezrati rappelle les bases de l'éclairage scénique puis muséographique (moyens techniques, mise en oeuvre du projet, spécificités des espaces...). Il retrace de façon passionnante et illustrée l'évolution de l'éclairage des musées, depuis l'utilisation étudiée de l'éclairage naturel, et montre l'influence des développements technologiques du début du XXe siècle jusqu'à aujourd'hui. Il insiste en outre sur la nécessité pour l'éclairagiste ou le concepteur lumière de se mettre à l'écoute du concepteur de l'exposition, afin de comprendre au mieux la demande et les "déterminants", pour ensuite imaginer une réponse en fonction de sa propre sensibilité. Il relativise l'importance des (nouvelles) technologies et met en garde contre une débauche d'éclairages localisés, de projections colorées, de mouvement et de programmation, en rappelant qu'un éclairage naît d'abord d'une réflexion et que toute action est porteuse de sens – même involontaire ou incontrôlé, pourrions-nous ajouter. La technologie ne sauve pas un éclairage mal conçu. En revanche, elle permet, grâce à sa souplesse et son contrôle, de réaliser exactement ce qu'on a pu imaginer. L'auteur propose donc une approche sémiotique de l'éclairage d'exposition et explique, notamment à l'aide d'exemples tirés de sa grande expérience des musées, comment la maîtrise technique et plastique d'un éclairage permet d'en faire un support de sens.
Concevoir un éclairage d'exposition, c'est trouver un compromis acceptable entre présentation et conservation des objets, documents et oeuvres d'art : on sait qu'exposer signifie aussi mettre en danger. Ezrati, qui considère l'exposition comme un lieu de partage (des connaissances, des collections) avec les publics, montre, exemples à l'appui, qu'un éclairage étudié permet généralement de dégager des solutions, même pour des collections particulièrement fragiles, en particulier dans le contexte de l'exposition temporaire. Selon lui, il faut assumer les risques de l'exposition – et évidemment les limiter – pour donner accès à chacun au patrimoine. C'est pourquoi les données techniques de l'éclairage relativement aux exigences de la conservation préventive sont couplées aux éléments d'ergonomie visuelle. Son attention se porte notamment sur la difficulté liée au vieillissement : pour une même performance de lecture, il faut deux fois plus de lumière à soixante ans qu'à vingt ans. Si l'on ne prend pas ce fait en considération, on prive une grande partie des visiteurs de l'intérêt de leur visite. Dans les solutions qu'il propose, Ezrati se montre tout aussi soucieux de la conservation des collections que de la satisfaction des visiteurs. C'est aussi pour résoudre ce paradoxe qu'il est indispensable de connaître les aspects techniques de l'éclairage. Notons que l'auteur ne bannit pas le recours à la lumière du jour, pour autant qu'elle soit maîtrisée. Il consacre plusieurs pages à l'utilisation des filtres ainsi qu'au protocole DALI, qui permet la programmation d'un éclairage dynamique, notamment pour s'adapter aux variations de la lumière naturelle.
Malgré la matière rassemblée par l'auteur, cet ouvrage ne fera pas de ses lecteurs des éclairagistes chevronnés! Il a plutôt pour vocation de fournir des notions d'éclairage aux étudiants et professionnels des musées et du patrimoine, ainsi que des notions de muséologie et d'exposition aux étudiants et professionnels du domaine de l'éclairage. Ce manuel propose aux uns et aux autres un aperçu des bases, des exigences, des intentions, des missions, des données techniques et plastiques qui permettent d'engager le dialogue et favorisent l'écoute mutuelle, indispensables à la réussite d'un projet d'exposition. Rappelons qu'au cours de sa carrière, Jean-Jacques Ezrati ne s'est pas seulement intéressé à l'éclairage mais à l'exposition au sens large ; il avait en outre publié avec Claire Merleau-Ponty un ouvrage sur la mise en exposition2. Cet intérêt donne une réelle profondeur aux conseils, aux explications et aux applications qu'il propose ici.
Le format "manuel" et le texte synthétique laissent parfois le lecteur sur sa faim. L'auteur passe très vite sur les qualités (et les défauts) de la lumière naturelle, sur l'influence de l'environnement (nature du revêtement et couleur des murs, du sol...) dans la conception et la perception d'un éclairage, sur les risques encourus par les différents matériaux constitutifs des biens patrimoniaux suite à leur exposition à la lumière, sur l'effet combiné de la lumière et des autres conditions environnementales en matière de conservation... Mais c'est le propre de ce type de publication qui, par définition, ne peut approfondir tous les aspects d'une question. Ajoutons que l'ouvrage, fidèle à la ligne de l'éditeur qui a aussi proposé d'autres manuels consacrés à l'exposition3, est abondamment illustré, contient un glossaire – bien nécessaire pour comprendre certains raccourcis dans le texte – et des entretiens avec des professionnels. L'auteur adresse par ailleurs divers conseils aux jeunes et aux novices : l'importance de la formation (il donne d'ailleurs une liste d'établissements) et des connaissances techniques mais aussi de la sensibilité – une part du travail est effectivement basée sur la subjectivité, de l'expérience de terrain, de l'autoformation et, on ne le rappellera jamais assez, de l'autocritique.
Notes
1 EZRATI Jean-Jacques, Manuel d'éclairage muséographique, Dijon, OCIM, 2e éd., 1999 et EZRATI Jean-Jacques, Théorie, technique et technologie de l'éclairage muséographique, Paris, Editions AS, 2002.
2 MERLEAU-PONTY Claire et EZRATI Jean-Jacques, L'exposition, théorie et pratique, Paris, L'Harmattan, 2005.
3 BENAITEAU Carole, BENAITEAU Marion, BERTHON Olivier et LEMMONIER Anne,Concevoir et réaliser une exposition, Paris, Eyrolles, 2012 et HUGHES Philip,Scénographie d'exposition, Paris, Eyrolles, 2010.
Pour citer cet article de Noémie Drouguet
Référence électronique
Noémie Drouguet, « Jean-Jacques Ezrati, Eclairage d'exposition. Musées et autres espaces, », CeROArt [En ligne], 10 | 2015, mis en ligne le 05 mars 2015, consulté le 29 octobre 2015. URL : http://ceroart.revues.org/4572
Eclairage d'exposition. Musées et autres espaces, Paris, Eyrolles, 2014,(167 p.)
Mots-clés :conservation, exposition, musée, éclairage, sémiotique, théâtre,visiteur
Successivement régisseur lumière au Centre Pompidou, éclairagiste conseil à la Direction des Musées de France, puis membre du C2RMF, Jean-Jacques Ezrati, aujourd'hui consultant et formateur en éclairage, est bien connu du monde muséal. Ses précédents ouvrages consacrés à l'éclairage muséographique1 sont des références appréciées des étudiants et des professionnels des musées. Le nouveau manuel qu'il vient de publier trouvera lui aussi une place de choix dans la bibliothèque de tous ceux qui s'intéressent à l'éclairage d'exposition : les muséographes et les conservateurs, les scénographes et les architectes, les éclairagistes et les concepteurs lumière.
L'ouvrage s'ouvre avec le rapprochement entre l'éclairage d'exposition et l'éclairage scénique, dans le monde du théâtre essentiellement. Soulignant autant les différences que les similitudes entre ces deux domaines, l'auteur met en évidence une caractéristique essentielle de l'éclairage muséographique : on ne peut pas le réduire à un acte technique car il constitue l'un des supports du message de l'exposition. Comme l'éclairage scénique participe de l'interprétation d'une pièce (qu'elle soit musicale ou théâtrale) en plongeant le spectateur dans des ambiances particulières, l'éclairage d'exposition revêt une dimension conceptuelle en guidant la perception et l'appréhension d'un ou plusieurs messages par le visiteur. Certes, les quelques pages dédiées à une histoire des lieux, théâtre ou musée, ne donnent qu'un aperçu simple et quelque peu rebattu de l'évolution des institutions mais elles permettent d'esquisser cette comparaison féconde, qui accompagnera le lecteur dans la suite de l'ouvrage.
Jean-Jacques Ezrati marque d'emblée son intérêt pour le public : tout comme on comprend qu'il apprécie la proximité, voire une certaine porosité entre la salle et la scène au théâtre, il s'intéresse autant sinon plus aux visiteurs des expositions qu'aux objets à éclairer. Ou, pour le dire autrement, il se plaît à rappeler à ses lecteurs qu'une exposition n'a de sens que dans la mesure où elle transmet un contenu (objets et discours) à des publics variés. Constamment, il se soucie de celles et ceux qui sont amenés à parcourir une exposition et à regarder les collections exposées. C'est la raison pour laquelle Ezrati reprend à son compte une citation de Clarence S. Stein dans son rapport de la Conférence de Madrid sur l'architecture et l'aménagement des musées, organisée par l'Office international des Musées (OIM), l'ancêtre de l'ICOM, en 1934 : "Dans l'étude de l'éclairage, on partira du principe que les musées d'art sont destinés aux êtres humains plutôt qu'aux objets inertes, qu'ils ont surtout leur raison d'être comme lieux de récréation et de compréhension et non comme magasins de dépôt" (p. 47). L'éclairage a donc un rôle à jouer dans le rapport qui se tisse entre l'exposition et le visiteur, entre l'objet et celui qui le regarde. Il contribue à la mise en espace et à la mise en relation ; donc à la scénographie.
En bon pédagogue, Jean-Jacques Ezrati rappelle les bases de l'éclairage scénique puis muséographique (moyens techniques, mise en oeuvre du projet, spécificités des espaces...). Il retrace de façon passionnante et illustrée l'évolution de l'éclairage des musées, depuis l'utilisation étudiée de l'éclairage naturel, et montre l'influence des développements technologiques du début du XXe siècle jusqu'à aujourd'hui. Il insiste en outre sur la nécessité pour l'éclairagiste ou le concepteur lumière de se mettre à l'écoute du concepteur de l'exposition, afin de comprendre au mieux la demande et les "déterminants", pour ensuite imaginer une réponse en fonction de sa propre sensibilité. Il relativise l'importance des (nouvelles) technologies et met en garde contre une débauche d'éclairages localisés, de projections colorées, de mouvement et de programmation, en rappelant qu'un éclairage naît d'abord d'une réflexion et que toute action est porteuse de sens – même involontaire ou incontrôlé, pourrions-nous ajouter. La technologie ne sauve pas un éclairage mal conçu. En revanche, elle permet, grâce à sa souplesse et son contrôle, de réaliser exactement ce qu'on a pu imaginer. L'auteur propose donc une approche sémiotique de l'éclairage d'exposition et explique, notamment à l'aide d'exemples tirés de sa grande expérience des musées, comment la maîtrise technique et plastique d'un éclairage permet d'en faire un support de sens.
Concevoir un éclairage d'exposition, c'est trouver un compromis acceptable entre présentation et conservation des objets, documents et oeuvres d'art : on sait qu'exposer signifie aussi mettre en danger. Ezrati, qui considère l'exposition comme un lieu de partage (des connaissances, des collections) avec les publics, montre, exemples à l'appui, qu'un éclairage étudié permet généralement de dégager des solutions, même pour des collections particulièrement fragiles, en particulier dans le contexte de l'exposition temporaire. Selon lui, il faut assumer les risques de l'exposition – et évidemment les limiter – pour donner accès à chacun au patrimoine. C'est pourquoi les données techniques de l'éclairage relativement aux exigences de la conservation préventive sont couplées aux éléments d'ergonomie visuelle. Son attention se porte notamment sur la difficulté liée au vieillissement : pour une même performance de lecture, il faut deux fois plus de lumière à soixante ans qu'à vingt ans. Si l'on ne prend pas ce fait en considération, on prive une grande partie des visiteurs de l'intérêt de leur visite. Dans les solutions qu'il propose, Ezrati se montre tout aussi soucieux de la conservation des collections que de la satisfaction des visiteurs. C'est aussi pour résoudre ce paradoxe qu'il est indispensable de connaître les aspects techniques de l'éclairage. Notons que l'auteur ne bannit pas le recours à la lumière du jour, pour autant qu'elle soit maîtrisée. Il consacre plusieurs pages à l'utilisation des filtres ainsi qu'au protocole DALI, qui permet la programmation d'un éclairage dynamique, notamment pour s'adapter aux variations de la lumière naturelle.
Malgré la matière rassemblée par l'auteur, cet ouvrage ne fera pas de ses lecteurs des éclairagistes chevronnés! Il a plutôt pour vocation de fournir des notions d'éclairage aux étudiants et professionnels des musées et du patrimoine, ainsi que des notions de muséologie et d'exposition aux étudiants et professionnels du domaine de l'éclairage. Ce manuel propose aux uns et aux autres un aperçu des bases, des exigences, des intentions, des missions, des données techniques et plastiques qui permettent d'engager le dialogue et favorisent l'écoute mutuelle, indispensables à la réussite d'un projet d'exposition. Rappelons qu'au cours de sa carrière, Jean-Jacques Ezrati ne s'est pas seulement intéressé à l'éclairage mais à l'exposition au sens large ; il avait en outre publié avec Claire Merleau-Ponty un ouvrage sur la mise en exposition2. Cet intérêt donne une réelle profondeur aux conseils, aux explications et aux applications qu'il propose ici.
Le format "manuel" et le texte synthétique laissent parfois le lecteur sur sa faim. L'auteur passe très vite sur les qualités (et les défauts) de la lumière naturelle, sur l'influence de l'environnement (nature du revêtement et couleur des murs, du sol...) dans la conception et la perception d'un éclairage, sur les risques encourus par les différents matériaux constitutifs des biens patrimoniaux suite à leur exposition à la lumière, sur l'effet combiné de la lumière et des autres conditions environnementales en matière de conservation... Mais c'est le propre de ce type de publication qui, par définition, ne peut approfondir tous les aspects d'une question. Ajoutons que l'ouvrage, fidèle à la ligne de l'éditeur qui a aussi proposé d'autres manuels consacrés à l'exposition3, est abondamment illustré, contient un glossaire – bien nécessaire pour comprendre certains raccourcis dans le texte – et des entretiens avec des professionnels. L'auteur adresse par ailleurs divers conseils aux jeunes et aux novices : l'importance de la formation (il donne d'ailleurs une liste d'établissements) et des connaissances techniques mais aussi de la sensibilité – une part du travail est effectivement basée sur la subjectivité, de l'expérience de terrain, de l'autoformation et, on ne le rappellera jamais assez, de l'autocritique.
Notes
1 EZRATI Jean-Jacques, Manuel d'éclairage muséographique, Dijon, OCIM, 2e éd., 1999 et EZRATI Jean-Jacques, Théorie, technique et technologie de l'éclairage muséographique, Paris, Editions AS, 2002.
2 MERLEAU-PONTY Claire et EZRATI Jean-Jacques, L'exposition, théorie et pratique, Paris, L'Harmattan, 2005.
3 BENAITEAU Carole, BENAITEAU Marion, BERTHON Olivier et LEMMONIER Anne,Concevoir et réaliser une exposition, Paris, Eyrolles, 2012 et HUGHES Philip,Scénographie d'exposition, Paris, Eyrolles, 2010.
Pour citer cet article de Noémie Drouguet
Référence électronique
Noémie Drouguet, « Jean-Jacques Ezrati, Eclairage d'exposition. Musées et autres espaces, », CeROArt [En ligne], 10 | 2015, mis en ligne le 05 mars 2015, consulté le 29 octobre 2015. URL : http://ceroart.revues.org/4572
Compte rendu de lecture par Claire Merleau-Ponty, muséolgue
https://issuu.com/internationalcouncilofmuseums/docs/icomnews68ang/22